Last but not least...

Je mets les photos en ligne. Faut cliquer sur les liens pour les voir, les mettre directement aurait fait une page web bien trop lourde. Les images correspondent au sujet, mais quelqu'un d'averti (enfin, nous trois) verra que j'ai parfois triché, genre des images de la descente que j'utilise pour la montée.

Ce sont pour le moment uniquement celles d'Arthur et moi, car je ne pourrai scanner celles de Claire avant quelques jours. C'est évidemment une sélection, de toute façon on a plus de 8Go d'images. Elles sont aussi redimensionnées pour tenir sur l'espace web, et les couleurs sont légèrement corrigées (mais de manière automatique pour aller plus vite, sauf exception). Pour avoir d'autres photos ou les originaux, vous pouvez les demander ici (mais Arthur a normalement l'exacte copie de ces photos).

D'ailleurs, Claire et Arthur, manifestez vous si vous voulez voir d'autres photos (ou si les photos de vous ne vous plaisent pas :] ), c'est quand même autant votre voyage que le mien.

Message de dernière minute: j'arrête là pour le moment, c'est sacrément long. En plus, je vous soupçonne d'être pas mal à être connecté, et avec les images la bande passante est saturée. La connexion plante, j'ai des messages de serveur surchargé...

Message du lendemain de la dernière minute: C'est fini, ou presque. Manque donc les photos de Claire, qui rééquilibreront un peu. Comme elle avait un tout petit appareil, pas encombrant, c'est elle qui a le plus de photos de montagne (exemple flagrant: le Huayna Potosi). J'ai modifié certains textes pour coller d'autres photos ou parceque j'aimais pas.

Après une suggestion de Claire, j'ai implémenté un album photo avec miniatures. Il est accessible ici ou bien dans la rubrique 'Liens' à droite, le nouveau bouton 'Album Bolivie 2007'. Chaque clic sur un texte lié à une photo y ramène, donc pour revenir au blog proprement dit il suffit de cliquer sur le bouton 'Page précédente' de son navigateur, ou sur 'Thumbnails' pour aller à la page de présentation des photos. Merci XnView pour gérer tout le bazar de programmation dont je suis incapable, plus qu'à changer légèrement les couleurs. Mais comme ce n'était pas prévu à la base, les photos sont en désordre complet et avec des noms aussi parlants que 'img22', tant pis. Mais j'en ai rajouté pas mal, du coup. Comme j'ai du légèrement changer l'adresse des photos dans le texte, merci de me dire s'il y a des liens morts.

Edit de beaucoup de temps après: voilà enfin les photos de Claire. Les scans sont assez mauvais, mais ça donne un petit charme désuet à la série de photos. Et puis je manque de temps pour faire ça vraiment bien. L'album photo est mis à jour, c'est dans le désordre complet, mais pas le temps de faire mieux, de rajouter des liens pour expliquer ce qui est quoi, etc... Je pense que c'est la dernière modification à propos de la Bolivie.

Il fallait s'y attendre:

American Airlines a perdu mes deux sacs... Si si si. Je SAVAIS qu'on aurait du se plonger chacun dans un tonneau d'eau bénite à Copacabana. On va quand même espérer les revoir dans quelques jours. Allez.

Sinon, 38h de transit c'est toujours long. Si jamais vous passez par l'aéroport de Miami, demandez moi: je connais maintenant tous les coins pour faire la sieste. Avec même les différences d'épaisseur des moquettes de chaque étage. Par contre, je n'arrive toujours pas à me faire à leur, euh, café.

Reste à avoir des nouvelles de Claire et Arthur. Normalement j'ai aspiré tout le mauvais oeil et ça devrait se passer nickel pour eux. Peut-être. Et enfin, dès que j'ai retrouvé mon ordi, je sélectionne et poste des potos illustrant les différents billets, promis. Ca fait trop longtemps que des tas de gens le demandent.

Arthur nous l'avait dit plusieurs fois...

...quand il etait suant, tirant la langue sous son mauvais sac, ou bien en equilibre sur deux dents de ses crampons au-dessus d'une crevasse. En general il nous lancait un grand regard bleu et fatigue et nous sortait 'Et dire qu'on pourrait etre a Copacabaña a manger des truites sur le bord du lac...'

He bien c'est fait, on se doutait qu'il faudrait y aller ou risquer la crise diplomatique. Et puis quoi, la truite, c'est quand meme bon. Copacabana, c'est beaucoup moins pollue que La Paz, beaucoup plus tranquille, genre Petit Village Touristique - Station Balneaire - Bateaux Sur Le Lac Avec Coucher De Soleil Dans Le Fond. Il y a plein de rastas qui vendent des bijoux de pacotilles, et on ecoute du Manu Chao dans les rues. Mais la truite est divine et la caipirinha pareille.

Le lendemain, on part faire un tour en bateau jusqu'a l'ile du soleil, ancien lieu de pelerinage Inca. Grande ile pelee, entierement construite en terrasse pour les anciennes cultures, quelques eucalyptus. Comme on a decide d'y passer la nuit, on doit faire 3h de marche en deux jours. Autant dire qu'on commence par la sieste, histoire de laisser passer les autres touristes, plus presses. La lumiere est superbe, entre le lac lisse comme un miroir et le sommet de l'Illampu et de l'Ancohuma qui dominent au loin (aucun regret de ne pas y etre alles). On passe la nuit dans un des hotels les plus chics que nous ayons vus: une chambre presque comme a la maison, le lit est meme assez grand pour moi, c'est dingue.

On repart le lendemain tranquille pour La Paz, ou il faut faire quelques courses avant de repartir en France.

A tres bientot, cette fois-ci.

De montagnes en jungles

Desireux de nous reposer, nous avons donc opte pour un trek entre La Cumbre et Coroico, sur un ancien chemin Inca menant d'un col de montagne au coeur de la jungle. Plus de 3000m de denivele en descente. Fermement resolus a etre legers cette fois-ci, nous ne prenons que le minimum: pas de baudriers, pas de piolets, pas de broches, pas de grosses chaussures, pas de doudounes, pas de casques et plein de bouffe. Et comme on a plein d'essence, on pourra se faire des repas chauds tout le temps, le grand luxe. Et comme on est toujours un peu tetes brulees, au lieu de partir un matin un peu tot, on part la veille un peu tard, pour gagner du temps, l'argent de la chambre d'hotel, et parcequ'on en a marre de La Paz.

Devant l'air interrogateur de la vendeuse de billets de bus pour La Cumbre, on aurait du tiquer. Devant son air semi interloque apres notre affirmation de camper la-bas, on aurait du se renseigner. Mais bon, nous voila partis. Arrives a La Cumbre, on saisit tout de suite le probleme. On va faire succinct:

Plafond nuageux: environ a 30m

Visibilite: Oscille entre 20 et 5m

Taux d'humidite: Disons 98%

Temperature: Certainement pas plus de 10 degres

A cote d'un lac, sur un sol pele et assez souvent detrempe

Il fait nuit, et a part les duvets on a rien de serieux pour se proteger du froid

Ces petites erreurs d'appreciation, c'est bien sympa, c'est pas bien grave, mais ca commence a bien faire.

On marche un peu dans une clarte glauque, evoluant dans un brouillard a couper au couteau, on trouve un endroit plat et presque sec pour la tente, on mange tres vite et on se couche en se disant qu'on fera secher tout le materiel plus tard. En plus on est en plein milieu d'une des reserves d'eau pour La Paz, le camping ne doit pas etre tres bien vu. Va falloir se lever tot et deguerpir tres vite le lendemain. Des le matin, il fait toujours aussi froid mais le plafond s'est un peu releve. Nous sommes tout a fait rasserenes en voyant que nous nous dirigeons vers une eclaircie, c'etait donc bien une humeur meteorologique sans consequences, nous n'allions plus regretter nos doudounes. C'est alors qu'il s'est mis a neiger. Une petite neige drue, fine et tenace, dans un brouillard renouvele. Juste pour resituer le contexte vestimentaire: histoire d'etre vraiment leger, Arthur etait en sandales. De bonnes sandales de semi-montagne, certes, mais des sandales.

N'y voyant rien, on suit la route (enfin, une des routes) pour au moins ne pas se perdre. On arrive a un col probable, avec un gros cairn (suffisamment gros pour qu'on arrive a le voir dans cette puree de pois), et on a la chance de voir un bolivien emerger du brouillard juste a temps pour nous confirmer que c'est bien le debut du trek. On a de la chance, sur ce coup la.

Commence un parcours irreel: entierement dans les nuages, sans rien y voir, on descend un chemin de pierre accroche a flanc de falaise. Le pavage est antediluvien, la route tres raide, on est accroches entre ciel et terre dans le brouillard. Le silence est complet, on entend la neige tomber. On croise de temps en temps des boliviens remontant le sentier, un troupeau de lamas conduits par des gosses pieds nus dans des sandales, ne laissant emerger que les yeux de grands chales de laine. Au bout de trois heures de neige, on etait assez bas pour qu'elle se change en pluie. Toujours dans le brouillard, on a vu reapparaitre les murets de pierre indiquant des champs, emerger les premiers buissons avec la baisse de l'altitude, puis quelques arbres barbus de lichens. Puis une vraie vegetation tropicale, et nous nous sommes arretes pour la nuit a Challapampa, au debut de la jungle. Nous qui avions choisi ce parcours pour se reposer et avoir chaud, on avait eu le choix entre neige, pluie, gresil et bruine sous le brouillard, descendant 2000m de denivele pendant 9h de marche. Rate. Et en plus, on a oublie une partie de notre nourriture a La Paz.

Les jours suivants il faisait beau, c'est a dire qu'il ne pleuvait pas. On a meme eu droit a quelques rayons de soleil, ce qui nous a permis de prendre plein de photos d'arbre et de vert. Et de plantes. Cela faisait 1 mois que nous n'avions pas vu un arbre digne de ce nom. Il y avait bien eu les queñuas pres du Sajama, mais ils font plus penser a de gros buissons ligneux. Le sentier est identique a lui meme: accroche a flanc de foret, boueux, herbu, parfois un arbre repoussant le dallage au milieu de la chaussee ou un ruisseau le choisissant comme lit principal. Tres raide de chaque cote, avec des murs de vegetation luxuriante. Pas facile de composer, de separer un sujet dans ce bazar. En macro, peut-être ? Il faut absolument que je me trouve un livre de botanique tropicale, c'est tres frustrant de ne rien pouvoir reconnaitre. Parfois des lamas ou chevaux paissent directement sur le sentier, parfois quelques tombes car nous sommes au seul endroit horizontal. Plein de cris d'oiseaux inconnus, de temps en temps un colibri deguerpit en froufroutant dans un flou d'ailes. Quelques arbres enormes et plus d'animaux: termitieres, un couple d'aras (ils avaient des remiges manquantes a la queue, le marsupilami avait du passer par la), des perruches bavardes. On apercoit plusieurs flamboyants, qui mettent une touche de rouge dans le vertical. On arrive a Choiro pour 13h, alors qu'un bus part pour Coroico. Coup de chance: il nous prend aussitot, on n'a meme pas le temps de se reposer de la journee. On y est plus secoue que transporte, mais on arrive a temps pour manger. On repart ensuite aussitot pour La Paz ou nous attend un resto argentin avec un excellent vin chilien.

Cet apres-midi, on part pour Copacabaña, le lac Titicaca et l'ile du soleil. A bientot.

Un toit pour nous tout seuls...

...Et on en n'a pas profite. Damned.

Nous etions partis pour le Sajama, le sommet le plus haut de la Bolivie: 6500m et des brouettes. Comme d'habitude, c'est une aventure rien que pour aller au village qui permettra d'evisager de peut-etre emettre l'hypothese de grimper eventuellement au sommet. On prend donc un car pour le Chili, qui nous deposera a Laguñas, sur le chemin. Il faut imaginer une enorme bestiole: 70 places au bas mot, sureleve, avec des couleurs vives et du chrome sur les roues, du genre qui fait trembler le sol autour quand il a le moteur au ralenti. Et un chauffeur. Psychopathe. Aiguille bloquee a 120 (sur l'ergot qui la retient parceque c'est dangereux d'aller plus vite), qui grille les feux rouges et klaxonne meme quand ils sont verts, on n'a pas regrette d'etre devant. En tout cas, dans les guides ils disent que le trajet se fait en 4h, 3h si le chauffeur est rapide, on l'a fait en 2h-2h30. Chapeau. Quand on enleve les mains du visage, le paysage est assez beau.

Bref, Laguñas, en bordure du Parc National Sajama, domine de toute sa taille par la calotte glaciaire dudit Sajama. A l'intersection pour aller au village de Sajama, nous nous essayons au stop, tout en raccomodant certaines affaires. Charmant tableau de couturieres au bord d'une route au milieu de nulle part: l'une raccomode ses guetres, l'autre son pantalon, le dernier la tente. C'est qu'il ne passe pas beaucoup de voitures: Arthur aurait pu rajouter de la dentelle a ses bas de jambe, et moi mettre des rideaux en crinoline a la tente. Au bout de 2h, une camionnette passe et accepte meme de nous prendre (ce qui fait un taux de reussite au stop en Bolivie de 100%, mais faut etre patient). On n'a rien sans rien: elle transporte des peaux de lamas a peine ecorchees et des foetus de lama momifies... Claire et moi nous entassons dans la benne, avec les sacs et le reste (une odeur inoubliable. Malheureusement).

Sajama, charmant petit village plein de vent et de poussiere, regit par une doyenne qui nous dit exactement ou nous loger et ou manger. On arrive a planter la tente entre deux maisons, histoire de ne pas payer car on est un peu raides. Et on part pour les sources d'eau chaude du coin, dont Claire avait entendu parler depuis longtemps, elle reve d'avoir enfin un peu d'eau chaude (denree extremement rare en Bolivie, en general ca hesite entre tiedasse et carrement froid). Les sources seront tres bien: vaseuses, souffrees, avec de la vapeur qui monte et tout. On devait partir le lendemain pour le Sajama, mais finalement repos car Arthur est malade. Non, ne me demandez pas comment il fait.

Surlendemain, on decide de faire deux journees en une: au lieu de passer deux jours pour aller d'abord au camp bas, puis au camp haut, on fera les deux dans la journee. 1300m de denivele en tout, mais on a tous fait bien pire. On loue une mule pour le debut du trajet, un porteur pour la suite et c'est parti. Apres tout nous sommes acclimates et on regarde de haut les touristes qui partent avec un sac de 20 litres, deux porteurs chacun, un guide, une cuisiniere et 5 tentes. Mais en fait c'est une grossiere erreur: 1300m de deniveles dans les alpes n'ont rien a voir avec 1300m ici, entre 4300 et 5600m. Et avec un seul porteur, nous sommes trop charges.

La première partie vers le camp bas est longue mais se passe bien, progressant dans des bois de quenua, en compagnie des volcans jumeaux Parinacota et Pomerata, de l'autre côté de la vallée. La seconde, par contre... Honnetement, la montee finale a ete une horreur, je n'ai (nous n'avons ?) jamais fait un truc aussi violent, dans un pierrier infame, a s'arreter tous les trois pas pour reprendre sa respiration et essayer de ne pas tomber dans les pommes. Nuit penible: Arthur est toujours malade, Claire a attrape une angine. A 3h30 nous sommes tellement peu vaillants qu'on se recouche, on attend le soleil, on dejeune et on descend. Tant pis pour le toit de la Bolivie. Au passage, on croise deux touristes qui montent avec justement un sac de 20 litres (mais que peuvent ils bien mettre dedans ? C'est meme pas assez grand pour un de nos casse-croute), deux porteurs et un guide. Claire leur aurait volontiers plante une broche a glace dans le dos, par inadvertance. Et moi je l'aurai tournee en utilisant un piolet technique, car je suis quelqu'un de serviable.

Retour a La Paz le lendemain, on apprend qu'un autre groupe a mis 19h pour faire l'ascension du Sajama, leur progression etant tres lente a cause des penitents de neige (jusqu'a 1m). Et maintenant plus que 10 jours de voyage, a nous demander si on repart pour l'Illimani (qui est une bavante peut-etre plus dure que le Sajama) ou si on opte pour la solution 'Doigts de pieds en eventail-Cocktail-Transat' a Copacabaña...

Huayna Potosi

Le Huayna Potosi, c'est un peu le Dome des Ecrins de la Bolivie: il y a un refuge, avec meme des fleches sur le sentier pour y aller, plein de touristes qui dorment et mangent dedans, pas besoin de potasser le topo pour savoir ou est le sommet et l'itineraire: il n'y a qu'a suivre la trace. Et elle est tellement bien damee, que si on met un pied a cote on s'enfonce jusqu'aux cuisses. Mais c'est beau quand meme.

Evidemment, nous avons dedaigne le refuge et son confort de satrapes, preferant trainer nos sacs de 20 kilos au nom d'une ethique montagnarde extremement rigoureuse. Non, en fait c'est qu'on n'etait pas au courant.

Bref, on monte le camp, on questionne les guides locaux et on decide d'innover cette fois-ci: on se levera a 2h du matin, depart a 3h (les guides et leurs clients partent 1h plus tot). Ca fait toujours bizarre, de se lever quand il est presque encore hier. Le fait d'etre dernier de cordee me permet de monter en pleine lethargie cotonneuse, histoire de finir ma nuit. Mais pourquoi diable s'est on leves aussi tot ? Pas de crevasses sur le glacier pour justifier le gel, on ne percoit que le monde eclaire par sa frontale et la montee est completement uniforme, desesperement monotone. Et il fait froid. Tellement froid, trop froid. Entre -20 et -30 vers 5-6h du matin, quand on approche des 6000m, avec du vent. Claire nous a bien fait peur, un peu plus et on redescendait en catastrophe. Mais vers 6h30 du matin, avec le lever du soleil, les choses s'arrangent et on atteint le sommet.

Redescente au camp, et on s'apercoit qu'on a fait la totalite de la course en 6h30, alors que les guides indiquent la montee seule en 4-6h. Bon, on est acclimates et on a la caisse (on a meme mis 2h dans la vue a un autre groupe de francais, partis une heure avant nous). Mais il est 9h30, je n'ai jamais fini une course aussi tot (ou alors, en se prenant un but) et bon sang, ca ne justifiait vraiment pas le fait de partir aussi tot, de ne rien voir a la montee et d'avoir froid a ce point. Personne n'a perdu d'ongles, mais on y a tous pense. Bizarre.

En tout cas, c'est notre premier 6000m pour Arthur et moi, demain on se bourre la gueule. Et comme on a fait toute la journee avec en tout et pour tout deux verres de flocons d'avoine chacun, la on sort du resto, je finis de rediger ce message et on y retourne. Mais on reste raisonnable: ici, le resto est a moins de 3 euros.

8 jours plus tard...

8 jours de symbiose avec ma doudoune, mon duvet et mon bonnet. Je pense qu'apres ca, mes enfants naitront avec.

C'est qu'il ne fait pas chaud du tout, au camp de base du Condoriri. 4600m d'altitude, a cote d'un petit lac, des tas d'endroits amenages pour le bivouac. On s'en est meme trouve un a l'ecart des autres, avec coin cuisine, table et tabourets de pierre. La vue est imprenable, toutes les faces sont devant nous, platrees de neige, imposantes.

Premier jour, lever a 4h du matin par -10 degres, pour gravir le pic Illusion: un petit sommet pas dur a 5300m, juste pour nous faire les dents. Mais la deconvenue vient assez vite: il n'y a pas assez de neige ou alors sous forme de penitents, trop de glace pour pouvoir passer rapidement, Arthur et son piolet droit ne sont pas rassures, et nos deux uniques broches a glace nous regardent d'un air goguenard. Quand il s'agit de passer sur le deuxieme glacier, fort raide, nous ne pouvons pas faire de longueur avec deux uniques broches et aussi redescendons nous deconfits.

Second jour, nouveau reveil a 4h du matin, avec les sachets de the qui gelent quand on les pose sur la table de pierre. Cette fois ci nous partons pour le Pequeño Alpamayo, bardes de broches a glace et le piolet technique en bataille, pas question de se faire avoir une deuxieme fois. Longue remontee du glacier, avec quelques crevasses vertigineuses, et nous debouchons au sommet du Tarija. C'est le choc: le Pequeño Alpamayo est une impeccable pyramide de roc et de neige, avec une arete arachneenne menant au sommet. 50 degres de pente de neige sur l'arete, ne pas regarder a droite et ne pas penser tomber a gauche. On y est arrive. On en repart fourbus, on rentre au camp epuises, mais ravis.

Troisieme jour, repos. Evidemment, il y a plein de vent et il neige, on se pele correctement. Je deconseille le menu 'Miette de Thon sur Charpie de Pain accompagne de Sauce Ketchup' quand on est trois dans une tente un peu juste, a manger au-dessus des duvets, alors que le vent fait tout pour nous renvoyer a La Paz. Sauce Mayonnaise, c'est beaucoup mieux.

Le jour suivant, nous partons pour un camp d'altitude afin de gravir le lendemain la 'Cabesa del Condor', le sommet principal du Condoriri. Sacs de 20 kilos avec tente, rechaud et provisions. 3h de marche pour arriver au bivouac, avec entre autre le passage de la beaucoup trop bien nommee 'Scree slope of Hell'. Une petite horreur de pente raide de graviers traitres et de cailloux mal degrossis, juste sous le glacier du Condoriri. A 5000m d'altitude, avec nos sacs trop lourds et nos haleines trop courtes. Mais nous parvenons enfin au 'High Camp': 5200m, une merveille de bivouac sur tables de pierre, expose au soleil couchant, avec une vue fantastique sur le Condoriri. Le bivouac ne vaut pas le detour, il merite le voyage.

Le lendemain, nouveau reveil a 4h, nous nous saturons de the et mangeons jusqu'a la nausee, et nouveau depart sous une lune tiree au cordeau. Pour le lever du jour, nous sommes sous le couloir qui nous menera a l'arete du Condoriri. Tres bonne surprise: on nous avait annonce le faire en 1h-1h30, nous sommes a l'arete en 20 minutes car les conditions de neige sont excellentes. Nous continuons sur l'arete, encore plus vertigineuse que celle de l'Alpamayo. Mais il ya trop de vent, il fait un froid glacial. Le passage cle: l'arete fait 40cm de large, avec 30 degres de pente, ce qui en soi n'est pas enorme. Mais de chaque cote, ce sont des pentes a 60 degres et 300m de vide. Ca revient a marcher sur une poutre en plein ciel, et a s'y dresser sur la fin pour franchir un mur de rocher de 2-3m de haut. Rien de tres difficile techniquement, mais tres impressionnant. Et le vent empeche toute velleite de passer debout. Claire s'y elance d'abord puis renonce. De mon cote, je suis tellement frigorifie que l'idee d'essayer ne m'effleure qu'a peine. Nous redescendons, en sautant quelques crevasses decidement bien beantes.

Nous passons le sixieme jour en repos, a maugreer contre le vent, les aretes de neige, nos incapacites notoires, la malchance (evidemment, les jour suivants sont absolument denues du moindre souffle de vent) et American Airlines.

Et nous revoici a La Paz, apres avoir redescendu notre camp en nous transformant en chevaux de bat. Nous devrions partir apres-demain pour le Huayna Potosi, considere comme le 6000m le plus facile du monde. Ensuite, vraissemblablement le Sajama et l'Illimani.

Par contre, il va falloir penser a contacter un mage vaudou pour de-marabouter Arthur, ou bien se rendre a l'evidence que Dieu existe, qu'il ne veut pas qu'Arthur fasse de la montagne, et entrer dans les ordres: non seulement nous n'avons toujours pas de nouvelles de son sac, mais il s'est fait une entorse en redescendant du camp de base...

Quelqu'un aurait un poulet noir ?